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Stratégies pour protéger sa propriété intellectuelle industrielle dans un contexte d’innovation continue

Stratégies pour protéger sa propriété intellectuelle industrielle dans un contexte d’innovation continue

Stratégies pour protéger sa propriété intellectuelle industrielle dans un contexte d’innovation continue

Comprendre les enjeux de la propriété intellectuelle industrielle

Dans un contexte de compétition technologique intense et d’innovation continue, préserver les actifs immatériels de l’entreprise devient un impératif stratégique. Brevets, dessins et modèles, savoir-faire technique : la propriété intellectuelle industrielle (PII) constitue un levier de différenciation, de valorisation et de pérennité pour les entreprises, en particulier les PME innovantes.

D’après l’INPI, plus de 15 000 demandes de brevets ont été déposées en France en 2023. Un signal fort qui témoigne de la dynamique inventive des entreprises françaises, mais aussi de la nécessité de structurer leur stratégie de protection.

Pourquoi est-ce crucial ? Parce qu’un bon concept non protégé devient très vite une opportunité pour vos concurrents. Parce que l’investissement en R&D mérite d’être rentabilisé via une exclusivité d’exploitation. Et parce que la maîtrise de sa PII est devenue un critère d’attractivité majeur auprès des investisseurs.

Encore faut-il disposer de la bonne approche. Voici les axes stratégiques à privilégier pour bâtir une protection solide et évolutive de votre propriété intellectuelle industrielle.

Anticiper la protection avant même le développement

Le premier réflexe à adopter n’est pas juridique, mais organisationnel. Avant le dépôt d’un brevet ou d’un modèle, il faut intégrer la PII dès la phase de conception du produit ou du procédé innovant. Trop d’entreprises développent en silo, puis « pensent dépôt » en toute fin de projet. C’est une erreur fréquente… et coûteuse.

Mettre en place une veille précoce sur l’état de l’art permet :

Un cas concret ? Une start-up industrielle en robotique collaboratif, accompagnée par un cabinet de PI dès la première phase de prototypage, a pu définir trois pistes techniques exploitables et bâtir une stratégie de dépôts coordonnés sur deux ans. Résultat : un portefeuille de cinq brevets stratégiques en 24 mois et une levée de fonds réussie.

Dépôt ne signifie pas « bouclier absolu »

Déposer un brevet ou un design est indispensable… mais ce n’est pas une assurance tous risques. Il faut savoir analyser l’étendue effective des droits, surveiller les infractions potentielles (contrefaçons) et être prêt à faire valoir ses droits.

Autrement dit, votre stratégie de PI ne s’arrête pas à l’enregistrement : elle débute avec lui. Il est vivement recommandé de :

On estime qu’environ 30 % des brevets déposés en Europe ne sont jamais exploités, faute de stratégie d’implémentation ou de valorisation. Autant dire qu’il ne suffit pas de verrouiller juridiquement : encore faut-il créer une dynamique opérationnelle autour des innovations protégées.

Adapter la protection à la typologie de l’innovation

Toutes les innovations ne se protègent pas de la même manière. Dans l’industrie, les choix dépendent fortement du type d’innovation concernée :

À noter : depuis la directive européenne de 2016 transposée en droit français (loi du 30 juillet 2018), le secret d’affaires bénéficie d’un cadre plus sécurisé, à condition d’avoir pris des « mesures raisonnables » pour conserver ce secret. Cela suppose l’usage de NDAs (accords de confidentialité), de politiques de contrôle d’accès et d’outils documentés de sécurité de l’information.

Exemple : une PME agroalimentaire qui développe un process innovant d’extraction à froid a préféré ne pas breveter son procédé (facile à détourner une fois publié), mais a mis en place un dispositif complet de sécurisation du savoir-faire. Résultat : zéro fuite en 5 ans, contrairement à bon nombre de concurrents ayant breveté prématurément.

Intégrer la propriété intellectuelle à la stratégie de l’entreprise

Comme pour tout actif immatériel, la PI n’a de valeur que si elle est pensée au service des objectifs business. Cela implique de :

Le cas de Michelin est à ce titre édifiant : l’entreprise ne se contente pas de déposer massivement (plus de 450 brevets/an), elle adapte en permanence sa stratégie PI à ses orientations R&D et commerciales, avec des droits regroupés autour de plateformes technologiques. Un modèle inspirant, même pour les ETI.

Pour les PME, cela passe par une gouvernance claire de la PI : désignation d’un référent innovation, politique de décision sur les dépôts, formation interne, intégration dans les business plans et les roadmaps technologiques.

Collaborations et confidentialité : les zones à risque

Open innovation, projets collaboratifs, co-développement… L’innovation se fait aujourd’hui rarement seul. Or, les partenariats exposent les entreprises à un risque de dilution ou de perte de leurs droits sur des inventions issues du travail commun.

Deux zones de vulnérabilité sont à surveiller :

Un mauvais cadrage peut coûter cher. Une PME du secteur énergétique a vu sa technologie partagée avec une grande entreprise être brevetée sans elle… faute d’avoir encadré en amont la collaboration technique. Une erreur qui aurait pu être évitée avec une simple clause de copropriété et d’obligation de dépôt conjoint.

Propriété intellectuelle et financement : un actif stratégique

Peu de dirigeants pensent à faire évaluer leur portefeuille de brevets lorsqu’ils cherchent des financements. Pourtant, un actif immatériel bien documenté et valorisé peut peser dans un dossier bancaire ou une levée de fonds.

La valorisation d’un brevet peut se faire via plusieurs méthodes : méthode des coûts (investissements en R&D), méthode des revenus (cash-flows actualisés issus de l’exploitation) ou méthode des comparables (transferts de technologies similaires).

En France, Bpifrance reconnaît de plus en plus la valeur stratégique de la PI. Il existe des aides spécifiques comme :

Une bonne maîtrise de votre stratégie PI devient ainsi un élément différenciant dans un plan d’affaires ou une présentation à des investisseurs (business angels ou fonds technos). Ils y voient un gage de maturité et de protection des marges futures.

Vers une culture d’entreprise orientée innovation et protection

La réussite d’une stratégie de protection ne repose pas uniquement sur le conseil de brevets ou le juriste de l’entreprise. Elle implique tous les collaborateurs : ingénieurs, commerciaux, designers, dirigeants. Car protéger, c’est aussi identifier ce qui mérite de l’être.

Développer une culture PI, c’est par exemple :

L’approche centralisée et « top-down » de la propriété intellectuelle est aujourd’hui dépassée. Pour répondre aux défis de l’innovation continue, la sécurité des savoir-faire passe par une vigilance partagée… et proactive.

Intégrer la PI au cœur des réflexions stratégiques, c’est garantir l’exploitation exclusive des fruits de votre innovation. À l’heure où les cycles d’innovation se raccourcissent et où la concurrence s’accélère, c’est aussi un avantage compétitif durable que peu de PME peuvent se permettre de négliger.

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